Union Africaine : Que retenir du CAADP (Programme détaillé pour le développement de l'agriculture en Afrique) ?

Publié le par azizou-issa

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(sources :  documents de travail de la retraite à Midrand, Afrique du Sud, les 21 et 22 novembre 2012)

 

 

1. Historique du CAADP

 

Le Programme détaillé pour le développement de l'agriculture en Afrique (CAADP) a été adopté lors de la Conférence des chefs d'État et de gouvernement à Maputo (Mozambique) en 2003 en tant que cadre pour orienter et accélérer le développement agricole et rural en Afrique. Dans cette optique, les Chefs d'État et de gouvernement ont adopté des décisions et déclarations dont la Déclaration de Syrte sur les défis du développement intégré et durable de l'agriculture et de l'eau, adoptées en 2004 à Syrte (Libye) et la Déclaration de Syrte sur l'investissement dans l'agriculture pour la croissance économique et la sécurité alimentaire, adoptée en juillet 2009, toujours à Syrte en Libye.

 

Le CAADP est sous la coordination de la Commission de l'Union africaine, de l'Agence de planification et de coordination du NEPAD (Agence du NEPAD) et des Communautés économiques régionales (CER). Le CAADP est un programme du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) et est une vision et un cadre stratégique pour le développement de l'Afrique; il en est en fait une composante agricole.

 

 

II. Objectif, principes et objectifs spécifiques du CAADP

 

Le principal objectif du CAADP est d’aider les pays africains à augmenter la croissance économique grâce à un développement axé sur l’agriculture en vue d'éradiquer la faim, de lutter contre la pauvreté et d'améliorer la sécurité alimentaire et la nutrition, ainsi qu'accroitre les exportations.

 

Les principes suivants définissent les objectifs spécifiques et le cadre du CAADP :

 

i) atteindre une croissance basée sur l'agriculture comme principale stratégie pour atteindre les objectifs de sécurité alimentaire et de lutte contre la pauvreté, conformément à l'Objectif du Millénaire pour le développement sur l'éradication de la faim et la réduction de la pauvreté de moitié d'ici à 2015 (OMD-1) ;

 

ii) poursuivre un taux de croissance annuel moyen de 6 pour cent dans le secteur au niveau national ;

 

iii) allocation d'au moins 10 pour cent des budgets nationaux au secteur agricole ;

 

iv) exploiter les complémentarités régionales et coopérer pour stimuler la croissance ;

 

v) application des principes de l'efficacité des politiques, du dialogue, de l'évaluation et de la reddition de comptes, communs à tous les programmes du NEPAD ;

 

vi) utiliser les partenariats et des alliances, y compris entre les agriculteurs, l'agro-industrie et la société civile ;

 

vii) attribuer des rôles et responsabilités pour la mise en œuvre du programme dans chaque pays, la coordination des CER désignées et la facilitation de l'Agence du NEPAD.

 

 

III.  Piliers et domaines intersectoriels du CAADP

 

Le CAADP oriente les investissements vers quatre « piliers » interdépendants visant à améliorer l'agriculture en Afrique, et deux domaines intersectoriels.

 

Les quatre principaux piliers du CAADP sont les suivants :

 

• Pilier 1 : Gestion des terres et des eaux - étendre les superficies exploitées par une gestion durable des terres ;

 

• Pilier 2 : Accès aux marchés - améliorer les infrastructures rurales et les capacités liées au commerce pour l'accès au marché ;

 

• Pilier 3 : Fourniture de produits vivriers et lutte contre la faim - accroître les ressources vivrières et réduire la faim ;

 

• Pilier 4 : Recherche agricole – recherche agricole, diffusion et adoption des technologies.

 

Les deux domaines intersectoriels sont les suivants : la formation académique et professionnelle dans l'agriculture et les systèmes de connaissances, l'évaluation par les pairs et le dialogue politique. Les questions de la foresterie, de l'élevage et de la pêche dans le cadre du CAADP ont été soulignées dans le « Document d'accompagnement du CAADP ».

 

 

IV.  Méthodes de mise en œuvre et d'évaluation niveau national du CAADP

 

Les processus de mise en œuvre du CAADP au niveau des pays sont alignés avec les politiques et cadres élaborés au niveau national. Ils s'appuient sur les efforts en cours dans les pays, qui sont dirigés par des gouvernements nationaux et déployés en partenariat avec d'autres parties prenantes. Le processus national du CAADP préconise un bilan de l'évolution de l'agriculture, y compris un examen de la stratégie agricole de chaque pays et de son portefeuille de politiques agricoles, des dépenses publiques et des allocations budgétaires, des programmes et des institutions, en vue de déterminer ce qui conduit réellement la croissance agricole, en même temps que l'identification des problèmes et contraintes. S'appuyant sur cet examen, le processus du CAADP facilite l'analyse des objectifs de croissance agricole requis, des politiques, des programmes et des dépenses publiques qui sont suffisantes pour réduire efficacement la pauvreté. Dans le cadre du CAADP, la conception et la mise en œuvre des programmes d'investissement sont fondées sur la planification par les faits, qui suit les progrès et veille à l'utilisation effective des ressources, ce qui contribue à la croissance agricole et à la réduction de la pauvreté.

 

 

V.  Constats et Faiblesses dans la mise en œuvre du CAADP par les pays

 

En 2013, il y a 10 ans que le CAADP a été approuvé par la deuxième session ordinaire de l'Union africaine des chefs d'État et de gouvernement lors du Sommet de Maputo (Mozambique). Malgré les importants progrès réalisés depuis lors, l'Afrique et ses institutions sont toujours confrontées aux défis de la réalisation de ce cadre et de la vision pour créer la richesse, générer des emplois et garantir la sécurité alimentaire grâce à une productivité agricole accrue et à la compétitivité en tant qu'instrument d'intégration régionale et mondiale. Le CAADP, tout comme de nombreuses décisions de l'Union africaine, a été caractérisé par le non-respect par les gouvernements et les Communautés économiques régionales (CER), des principes et objectifs essentiels énoncés dans la Déclaration qu'ils ont entérinée. En dépit des progrès enregistrés par le CAADP dans certains États membres de l'UA, les responsables politiques et techniques aux niveaux national et régional ne sont pas effectivement engagés et mobilisés pour assurer le respect intégral.

 

Grâce au CAADP, les gouvernements africains se sont engagés à atteindre des cibles spécifiques, notamment en allouant au moins 10% de leurs budgets nationaux à l'agriculture et à atteindre un taux de croissance agricole annuel d'au moins 6%. L’une des principales caractéristiques du CAADP est l'accent mis sur le leadership africain, l'appropriation et le développement agricole durable comme un moyen essentiel pour parvenir à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté.

 

 

VI.  État de la mise en œuvre du CAADP

 

Malgré les faiblesses et les négligences évoquées au chapitre précédent, le CAADP a progressé dans l'agenda pour l'agriculture africaine à travers le continent. En eefet, la mise en œuvre du CAADP, en particulier ces dernières années a franchi des étapes importantes au cours desquels plus de 40 pays ont officiellement lancé la mise en œuvre du processus du CAADP, dont 30 ont signé leur Pacte national avec le CAADP. La signature du Pacte indique un accord multipartite de collaborer à l'examen des stratégies et programmes nationaux agricoles, conformément aux principes généralement convenus dans le cadre du CAADP. En outre 27 pays ont achevé leurs Plans nationaux d'investissement agricole et de sécurité alimentaire (PNIASA), ce qui a permis de renforcer l'intégration économique. À cet égard, l'IGAD le COMESA et la SADC se trouvent à un stade avancé dans la formulation de leurs pactes régionaux avec le CAADP et l'élaboration de leurs Plans nationaux d'investissement agricole et de sécurité alimentaire (PRIASA).

 

Des progrès ont également été accomplis dans la réalisation des objectifs fixés par le CAADP, tel que recommandé dans la Déclaration de Maputo. Entre six et dix pays ont atteint ou dépassé l'allocation de 10% de leur PIB au secteur de l'agriculture, même si beaucoup d'autres ont augmenté leurs allocations budgétaires, la moyenne pour le continent demeure à 6%. En ce qui concerne la croissance agricole, la moyenne pour l'Afrique pour la période 2003-2009 a été de 4,5%. En même temps, certaines régions ont connu une tendance à la hausse. Il s'agit des régions d'Afrique de l'Est, australe et de l'Ouest.

 

Un examen plus approfondi du CAADP révèle également que le processus a accumulé des gains pour stimuler la pensée critique vis-à-vis des politiques, stratégies et actions dans le secteur agricole orienté vers le développement et la réduction de la pauvreté. Il a également créé une plate-forme de concertation sur les enjeux nationaux dans l'agriculture et l'espace nécessaire pour l'évaluation de la reddition de comptes par les pairs est en cours de réalisation.

 

 

VII.  Perspectives dans la mise en œuvre du CAADP

 

Malgré les progrès importants réalisés dans le cadre du CAADP, beaucoup reste encore à faire. Les pays africains n'ont pas encore atteint les objectifs fixés dans les différentes arènes continentales et mondiales. L’un des domaines les plus préoccupants pour les gouvernements et les partenaires de développement est l'impact durable du CAADP dans la promotion de l'agriculture orientée vers le développement et la réduction de la pauvreté. À cette fin, il est évident qu'un environnement politique et institutionnel propice est important pour atteindre les résultats escomptés pour le CAADP, en plus de la création de structures et systèmes pour la prestation efficace des services.

 

Les domaines identifiés qui nécessitent des efforts supplémentaires sont, entre autres, les suivants :

 

i) l'engagement limité des responsables politiques et techniques aux niveaux régional et national pour la traduction effective des investissements du CAADP en programmes et projets bancables réalisables ;

 

ii) la mobilisation limitée des Communautés économiques régionales et des États membres pour se conformer aux décisions de l'UA relatives à l'avancement de l'agenda du CAADP ;

 

iii) l'engagement limité avec les partenaires techniques et financiers dans la mobilisation des ressources pour la mise en œuvre des plans d'investissement du CAADP.

 

À quand l'Afrique, à travers nos différents pays, individuellement et collectivement, va t-elle relever ce défi ???

 

 

Publié dans ACCUEIL

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